« They're selling postcards of the hanging
Well they're painting the passports brown
And the beauty parlor's filled with sailors
The circus is in town »
Les histoires tordues, c’est toujours pour ma pomme. Rhaaaa !! Mais qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu, hein ? Je vais me tirer une balle. J’aurais dû depuis longtemps, d’ailleurs ! Et tout ça, c’est de ta faute. Uniquement, et seulement de ta faute. Monstre. Assassin. Si un jour, on m’avait dit que ma vie allait tourner ainsi, je me serais probablement flingué. Mais, on ne m’a jamais rien dit. Jamais. Alors, je suis vivant. Je suis ici. Est-ce que je souffre ? Oui. Plus que tu ne te l’imagines. Mais, je le cache. Sinon, c’est moins drôle. Il faut savoir souffrir, pour vivre …
« Oh now look, here comes the blind commissioner
Well they got him in a trance
One hand is tied to the tight-rope walker
The other's in his pants »
Nous étions deux. Deux œufs différents. Deux accidents. Deux enfants. Deux mioches, destinés à la boucherie. Parce que, vois-tu, cette vie me tue. Oui. Nous étions deux. Des jumeaux. Des faux. Une fille, et un garçon. Une femme et un homme. Encombrants. Pas désirés. Nous sommes des martyrs. Nous sommes des monstres. Eloigne-toi donc de nous. Crains-nous. Fuis-nous. Je comprendrais. Je suis fou, peut-être. Mais, si j’ai sombré dans cette étrange folie, c’est uniquement à cause de ma vie. A cause de toi, aussi. J’ai tellement fui l’abattoir que je m’y suis jeté la tête la première dedans. Pardonne-moi. Pardonne-moi de te dire la vérité … Mais … Nous n’avons jamais été désirés, chérie. C’est ainsi. Ne pleure pas. Nos créateurs n’ont jamais su assumer. Nous sommes deux petits monstres. Les créatures de Frankenstein. C’’est ainsi. Et, même si on essaie, on ne pourra rien y changer …
« And the riot squad they're restless
They need somewhere to go
As Lady and I look out tonight
From Desolation Row »
- Serge Tisseron a écrit:
« Le fantasme de gémellité est au cœur de la relation que tout être humain entretient avec lui-même et avec ses semblables. Tantôt le jumeau imaginé est un compagnon idéal et le fantasme est heureux. Tantôt, il est un rival mortel et c'est un cauchemar. Pour les jumeaux réels, c'est un peu comme si ce fantasme était devenu réalité. Il n'y a alors que deux solutions ; toutes deux extrêmes. Soit ils s'éloignent l'un de l'autre pour mener leur vie sans plus de contact, soit au contraire, ils décident que la gémellité est la seule réalité désirable, quelque tragique et frustrante elle puisse être, et ils s'engagent totalement jusqu'à la mort. »
Tu connaissais ce Serge Tisseron ? Non ? Dommage. Tu aurais compris depuis bien longtemps, sinon. Oh oui, Carolyn, tu aurais compris. Tu te serais faite à la réalité. Mais, puisque tu ne veux en faire qu’à ta tête, eh bien, soit. Je souffrirais. Juste pour toi. Pour que tu puisses en tirer ce plaisir malsain. Avoue, Linnie, tu aimes me voir là, par terre, à essayer de me relever. Tu es méchante, Carolyn. Mais c’est ainsi que je t’aime, tu le sais …
Pourtant, regarde-nous. Tous les deux, depuis le début. Nous étions toujours ensemble, toujours là l’un pour l’autre. Tu étais ma jumelle, ma sœur de sang. On s’est soutenus, dans les moments les plus durs. On avait promis de tout tester ensemble avant de le faire avec les autres. On voulait découvrir les mêmes choses en même temps. Le projet a échoué, on dirait. Je crois que la mission est terminée.
« Cinderella, she seem so easy
"Well it takes one to know one," she smiles
And she puts her hands in her back pockets
Oh Bette Davis style »
Pourquoi est-ce que tout a valdingué, Linnie ? A cause de ce que je t’avais dit, il y a si longtemps ? A cause de mes sentiments ? A cause de ce que j’ai voulu faire ? Tout aurait pourtant été plus simple. Tu devrais ouvrir les yeux, Carolyn. Tu devrais arrêter de te mentir. De me mentir. De nous mentir. Enfin, il n’y a plus de « nous », maintenant. Tu étais mon paradis, chérie. Tu es mon enfer, à présent. Tu m’as brisé, à dire « non ». Je t’avais juste murmurée que je t’aimais. Je t’avais juste embrassée. Quel idiot j’ai été, de croire que nous serions ensemble jusqu’à l’éternité. Parce que, oui, je t’aime, Caro. Tu le sais. Tu es, à mes yeux, l’être parfait que je n’ai jamais rencontré. On se complétait. On était encore vivant, à l’époque. Mais tu m’as rejeté, chérie. Tu n’as pas voulu de moi. Tu as préféré m’oublier, me rayer de tes contacts. Tu es malsaine, Linnie ...
« And now here comes Romeo, moaning
"You Belong to Me I Believe"
And someone says, "You're in the wrong place, my friend
You better leave" »
J’ai essayé de t’oublier. Je me suis noyé. Entre les filles, entre les garçons, et la musique. La musique. Je me suis isolé, avec ma guitare. C’est peut-être la seule chose qui me souffle de l’air dans les poumons, maintenant. Et les filles, les garçons ? Ah, oui. Il m’a fallu me trouver une occupation. De la compagnie. J’aurais voulu que ma première fois soit avec toi, chérie. Mais non. Pour ma première fois, j’étais totalement bourré, avec une fille – ou bien un garçon ? – dont je ne me souviens même plus. C’est triste à dire, Caro, mais c’est ainsi. Et j’ai renoncé. J’ai renoncé à exister, chérie. C’est comme ça. Ne cherche pas. Si tu me vois rire, si tu me vois sourire, n’oublie pas que tout ça est faux. Je ne suis pas heureux. Même à côté de ce garçon avec qui je sors depuis quelque temps. Le temps de le dire, et pouf, c’est déjà terminé. Et j’enchaîne, j’enchaîne, un peu de tout, tant que je peux oublier ma douleur. Un peu de filles, un peu de gars, un peu de drogue. Ça aussi, c’est mal. Je le reconnais. Mais tu n’imagines même pas à quel point ça me fait du bien. Mais à quel point ! Pendant une demi-heure, tu as l’impression de voler. Je t’oublie. Juste un instant. Jamais définitivement.
J’aurais dû partir. Loin. Loin de toi. J’aurais dû filer en Alaska. J’aurais creusé un trou dans la neige, et je me serais allongé dedans. Et j’aurais attendu. Attendu. Jusqu’à ce que mon corps n’arrive plus à me chauffer. Ça aurait été un suicide original. Tu ne trouves pas ?
Je te déteste, Caro. Non, je t’aime. J’ai tort. Aimer sa jumelle … Quoi de plus horrible ? Quoi de plus douloureux ? Quoi de plus inceste ? Admire, Linnie. Admire-moi. Regarde ma longue déchéance. Ça te fait plaisir, hein ? Dis-le. Dis-le, que tu aimes me voir en train d’essayer d’échapper à cette affreuse noyade. Dis-le, que tu aimes me voir souffrir.
« And then the only sound that's left
After the ambulances go
Is Cinderella sweepin' up
On Desolation Row »
Je suis jaloux. Terriblement jaloux. De tous ceux qui ont eu le droit de te toucher. De te caresser. Je suis jaloux de ceux qui ont le droit à tes sourires. Oh oui. Je les déteste tous. Je suis sûr que tu ne leurs parle jamais de moi. Moi non plus, je ne parle jamais de toi aux autres. Ou presque jamais. Je me tais sur ma vie. Je ne veux pas faire fuir les rares êtres humains qui s’approchent de moi, chérie.
Crois-tu que je t’ai oubliée ? Si je ne t’ai pas adressé la parole, pendant toutes ces années, ça ne veut pas dire que je me suis envolé. J’ai sombré. Et je n’ai jamais cessé de te suivre. De te contempler. Tu déménages ? Moi aussi. Mais jamais chez toi. Je me fais discret, pour que jamais, jamais, tu ne me fasses souffrir encore. Je mens. Je souffre. Mais je me tais. Il faut se taire. Il faut sourire. Toujours. Comment veux-tu faire, sinon ? Que ferais-tu, à ma place ? Hein, Linnie ?
« Now at midnight all the agents
And superhuman crew
Go out and round up everyone
That knows more than they do »
Et à nouveau tu t’en vas. A Los Angeles. La ville des anges. Ahahah. Devrais-je comprendre quelque chose ? … Comment je sais où tu vas ? Je te suis tout le temps, Carolyn. Ce n’est pas bien difficile. Et cette fois aussi, je te suivrais. Peu importe ce qu’il va m’ne coûter. Est-ce que je t’espionne ? Non, enfin oui. Mais, comprends-tu pourquoi, sœurette ? Je ne veux pas te laisser. Je te vois souffrir, quand un homme te quitte. Mais je t’observe, en silence. Je ne suis jamais prêt de toi. Je ne suis jamais loin de toi. Mais … Tu sembles ne pas me voir. Je suis un fantôme. Il semblerait que je m’évapore, dès que tu tournes la tête vers le banc sur lequel je suis assis. Je pourrais t’admirer pendant des années encore. Si seulement tu voulais bien accepter la réalité, Carolyn … Si seulement … Au lieu de nous faire souffrir tous les deux …
My Chemical Romance ♣ Desolation Row